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Philip Beesley, Terreau hylozoique
Terreau hylozoïque (2007)
Philip Beesley, Terreau hylozoïque (2007)
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Terreau hylozoique
Terreau hylozoïque (2007)
Philip Beesley, Terreau hylozoïque (2007), détail
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Implant Matrix
Implant Matrix (2006)
Philip Beesley, fabrication manuelle de Implant Matrix (2006)
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Implant Matrix
Implant Matrix (2006)
Philip Beesley, Implant Matrix (2006), détail
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Implant Matrix
Implant Matrix (2006)
Philip Beesley, Implant Matrix (2006), détail
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Implant Matrix
Implant Matrix (2006)
Philip Beesley, Implant Matrix (2006), détail
Photo reproduite avec la permission de l'artiste

Philip Beesley, Orgone Reef
Orgone Reef (2003)
Philip Beesley, Orgone Reef (2003), vue d'ensemble
Photo reproduite avec la permission de l'artiste
Philip Beesley
Né à Westcliff-on-Sea (Royaume-Uni) en 1956
Vit et travaille à Toronto (Ontario)

Nous commençons notre parcours de l'exposition par une salle occupée par Terreau hylozoïque (2007) de Philip Beesley. L'œuvre de cet architecte constitue un sas par lequel nous, visiteurs, allons passer dans un espace-temps autre, un environnement bio métré, un espace réactif. Cette transformation de l'espace s'effectue par notre rencontre d'un réseau au comportement « organique et vivant ». Ces quasi végétaux en matière synthétique qui s'animent dans l'espace, se rétractent, se contractent, se détendent et s'ouvrent lors de notre passage, créent une étrange impression d'émerveillement ou d'anxiété. Ils suscitent des réponses affectives intenses chez les visiteurs « pour les amener à interroger les frontières entre la nature et l'artifice, et à examiner leur propre condition organique en regard de leur engagement dans un contexte technologique ». (1)

Terreau hylozoïque fait partie d'une série d'œuvres de l'artiste qui explorent toutes les nouvelles techniques et les nouveaux matériaux, les géotextiles interactifs et les membranes réactives ou sensibles, les réseaux d'objets actionnés, des toiles composées de systèmes interactifs primitifs. Elles emploient des capteurs et des détecteurs de proximité, des fils actionneurs, des actuateurs et des réseaux distribués de microprocesseurs. Elles font appel au savoir-faire de Philip Beesley dans le domaine des textiles architecturaux développé à l'Integrated Centre for Visualisation, Design and Manufacturing (ICVDM) de l'Université de Waterloo. Pour dire les choses dans un langage moins technique, les éléments et matériaux dans l'espace produisent un environnement réactif capable de « sentir » la présence des visiteurs. Des capteurs de proximité actionnent de minuscules structures assemblées en un réseau enchevêtré formant des « nuages » s'agitant au passage des visiteurs. Beesley explore les nouveaux environnements réactifs possibles grâce à des matériaux de pointe que les architectes utilisent dans des projets expérimentaux et, de plus en plus, dans des réalisations architecturales.

Son travail récent s'inscrit dans un courant de l'architecture actuelle appelé en anglais « responsive architecture », une architecture réactive. Cette architecture explore comment les systèmes naturels et artificiels interagissent. Mais le terme anglais responsive comporte une autre ramification portant l'idée de responsibility (responsabilité), d'action consciente : « responsiveness implies sensitivity ». (2) Pour Beesley et ses collègues, art, technologie et design, tels qu'ils s'incarnent dans cette architecture réactive, leur permettent de dépasser les oppositions binaires de nos systèmes habituels de pensée : les oppositions comme sujet/objet, soi/autre, forme/fonction, organique/inorganique, statique/dynamique. L'un des moyens du dépassement de ces dichotomies réside dans la temporalité agissante des systèmes biologiques et l'un des modèles pour la conception et la réalisation de tels environnements est le biomimétisme (biomimicry), la simulation numérique de fonctions, de comportements, de l'agir et du pâtir des vivants.

Mais en tant qu'artiste, Beesley signale que l'une de ses sources pour cet ensemble d'œuvres sculpturales se trouve dans les textes spiritualistes du dix-neuvième et vingtième siècle « qui reposent sur une combinaison troublante d'anxiété et d'espoir ». (3) On trouvera aussi dans les écrits récents de l'artiste la recherche d'une relation holistique aux environnements conçus grâce à ces nouveaux matériaux. Beesley a écrit récemment que « la frontière entre environnement et organisme s'atténue » (4) par l'utilisation de ces matériaux réactifs dans la fabrication de membranes réflexives. Cet effacement des frontières entre le visiteur et cette végétation intrigante réagissant à sa venue voudrait créer un espace pacifié où le centre et la périphérie, l'organisme et son environnement ne se distingueraient plus. Au cœur de cette réflexion réside une volonté d'harmoniser le monde artificiel et les processus naturels.

J.G. © FDL 2007


(1) Sylvie Parent, « Philip Beesley et Diane Willow : Reflexive Membranes » dans La fondation Daniel Langlois pour l'art, la science et la technologie, 2003 :
http://www.fondation-langlois.org/html/f/page.php?NumPage=377

(2) Philip Beesley, Sachiko Hirosue; Jim Ruxton, « Toward Responsive Architectures » dans Responsive Architectures : Subtle Technologies 06, sous la direction de Philip Beesley, Sachiko Hirosue et Jim Ruxton, Toronto, Riverside Architectural Press, 2006, p. 3.
(3) Traduction libre. Citation originale en anglais : « ...that dwell on uncanny mixtures of anxiety and hope ». Philip Beesley, « Orgone Reef » dans Philip Beesley (site Web personnel) : http://www.philipbeesley.com/
(4) Philip Beesley, Sachiko Hirosue; Jim Ruxton, « Toward Responsive Architectures », op. cit., p. 4.
Œuvre exposée

Terreau hylozoïque (2007)

Directeur de l'ingénierie : Robert Gorbet
Équipe principale : Hayley Isaacs, Christian Joakim, Jonah Humphrey, Kirsten Robinson, Jon Cummings
Avec : Eric Bury, William Elsworthy, Charisma Panchepakesan, Jonathan Tyrrell, Lawrence Chan
Coordinateurs de l'installation : Brady DelRosario, Chloe Doesburg, Lia Maston
Fabrication : Waterloo Architecture Cambridge

Soutenue par le Conseil des Arts du Canada, la fondation Daniel Langlois pour l'art, la science et la technologie, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, le Toronto Arts Council
Collection de l'artiste

Biographie

Architecte et scénographe reconnu, Philip Beesley réalise aussi des installations utilisant des technologies de pointe. Il est également professeur à l'école d'architecture de l'Université de Waterloo et codirecteur de l'Integrated Centre for Visualization, Design and Manufacturing (ICVDM), dans ce même établissement. Après une formation en art acquise à l'Université Queen's, Philip Beesley a effectué des études en architecture à l'Université de Toronto. C'est dans cette ville qu'il travaille aujourd'hui au sein de sa propre firme, responsable de la conception de plusieurs immeubles tant publics que résidentiels ainsi que de projets de design pour les arts de la scène et des expositions. Il a obtenu de nombreux prix pour ce travail, notamment la Médaille en architecture du lieutenantgouverneur de l'Ontario, le Prix de Rome en architecture, et en 2005, le Canadian Architect Award of Excellence pour la scénographie du French River Visitor Centre. Parallèlement à l'architecture, Philip Beesley est le créateur de nombreuses installations qui exploitent ses recherches sur les textiles d'architecture et plus particulièrement sur les structures à mailles interreliées.

Liens :
Musée des beaux-arts de Montréal Fondation Daniel Langlois