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Andrew Schloss

Andrew Schloss jouant du Radio Drum, 1992
Pionnier en musique nouvelle et électronique, Andrew Schloss perfectionne le Radio Drum, un instrument qu’il a commencé à utiliser à l’Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique (IRCAM) à la fin des années 1980. Selon Schloss :

« Le Radio Drum de première génération a été conçu par Bob Boie et réalisé au Bells Lab au milieu des années 1980 en tant que « souris tridimensionnelle ». Le Radio Drum fait appel à une méthode de détection capacitive : on utilise une radiofréquence pour mesurer la capacitance. On distingue les deux bâtons par l’emploi de différentes fréquences pour chacun d'eux. On pourrait qualifier le Radio Drum de « détecteur de gestes » qui suit constamment la trace des maillets dans un espace tridimensionnel de la façon suivante : l’extrémité de chacun des bâtons est enveloppée d'une petite quantité de fil conducteur d’électricité transmise par radiofréquence. La surface du tambour sous les bâtons reçoit le signal, et on trouve les positions x et y des bâtons en déterminant le premier moment de capacitance entre les bâtons et la surface au-dessous. On trouve la position z (hauteur) par la réciproque du premier moment. La plus grande précision de z se situe à environ 5 cm au-dessus de la surface et plus près. » (1)

Schloss s’intéresse, depuis, aux possibilités de cet instrument en explorant la musique informatique interactive et l’improvisation. Durant sa carrière, il s’est produit avec Laurie Anderson, Tito Puente, Chucho Valdès et Jeff Gardner. Il a reçu en 1985 un doctorat en sciences de l’ouïe et de la parole de la Stanford University (Stanford, Californie, États-Unis). De 1985 à 1989, il a été assistant professeur associé au département de musique de la Brown University et conférencier en 1989 au département de musique de la University of California à San Diego avant d'arriver, en 1990, à l’École de musique de l’université de Victoria en Colombie-Britannique, au Canada, où il est maintenant professeur adjoint. Outre son intérêt pour le Radio Drum, Schloss poursuit une recherche en ethnomusicologie portant principalement sur Cuba. Il est également codirecteur de la 2001 International Computer Music Conference (ICMC) qui se tiendra du 18 au 22 septembre 2001 à La Havane, à Cuba.

Depuis le début de sa carrière, Schloss accorde une attention particulière au rôle de l'informatique dans les performances musicales et il a composé plusieurs pièces au moyen d’ordinateurs et d’instruments virtuels. En 1980, il a créé The Towers of Hanoi, une composition générée par ordinateur et transmise par quatre canaux, au Center for Computer Research in Music and Acoustics (CCRMA) à la Stanford University. À la fin des années 1980, après ses premiers essais avec le Radio Drum à l’IRCAM, il compose pour ce nouvel instrument.

La première pièce issue de cette expérimentation s’intitule Meconium (1987-1988) et la version de 1988 représente sa première tentative d'intégration du contrôleur. Meconium est une œuvre interactive pour ordinateur, synthétiseurs et Radio Drum. Durant les années 1990, Schloss collabore fréquemment avec David Jaffe, compositeur et musicien établi à la Stanford University. Ensemble, ils ont créé Wildlife (1991) et The Seven Wonders of the World (1993), source d’inspiration pour une composition de Jaffe intitulée The Seven Wonders of the Ancient World (1996), un concerto pour Radio Drum et orchestre d’instruments à cordes pincées et à percussion. Aucun ordinateur n’est utilisé pour créer des sons dans cette composition qui table néanmoins sur des logiciels comme MAX pour suivre l’action des Radio Batons qui sont reliés au Radio Drum joué par Schloss. Les données sont alors transmises à un Disklavier qui est donc contrôlé par le battement du Radio Drum.

« L’idée de Jaffe pour cette pièce consistait à associer les gestes de la percussion aux sonorités du piano et bien que le traitement du piano comme instrument de percussion ne soit certes pas une idée nouvelle, le contrôle du Disklavier avec ce qui est essentiellement un instrument de percussion offrait au compositeur la possibilité d’explorer des idées intéressantes et auparavant irréalisables (...). » (2)

Des œuvres et des expériences réalisées par Schloss durant les années 1990 se dégage un fil conducteur ou un thème qui se manifeste dans un article de 1993 écrit par Jaffe et Schloss. Intitulé « Intelligent Musical Instruments: The Future of Musical Performance or the Demise of the Performer? » et publié dans INTERFACE Journal for New Music Research, cet article examine la possible disparition du virtuose et les effets de la technologie sur l’interprétation en direct de compositions musicales. Selon les auteurs :

« En vue d’augmenter la quantité d’informations transmissibles entre musicien et instrument (largeur de bande), on peut utiliser un ordinateur pour aider l’instrument à répondre de façons qui semblent "intelligentes". Cela veut dire développer des algorithmes qui traduisent les gestes d'un interprète et agissent sur eux de manière complexe. Toutefois, cela pose un nouveau problème : alors que depuis leur apparition les instruments acoustiques supposent une relation presque exclusive entre l’action du musicien et le résultat sonore, ces nouveaux instruments, avec leur technologie invisible (frôlant, par moments, la "magie") n’ont pas ce type de relation inhérente. La question est alors la suivante : avons-nous besoin d’une relation perceptible de cause à effet lors d’une performance en direct? » (3)

Cette préoccupation à propos des effets d’une performance en direct sur le public est primordiale dans l’élaboration des compositions de Schloss. Il a commenté les performances récentes en musique numérique ou électronique où les artistes, simplement assis sur scène derrière leurs ordinateurs, cliquent sur leur souris pendant que des sons sortent des haut-parleurs. (4) Or personne ne peut être certain que la performance est en direct ou que le « musicien » génère vraiment les sons. L’interprète pourrait être un musicien ou un programmeur expérimenté, mais il reste difficile pour le public, à moins de bien connaître la musique informatique, d’établir une relation entre la performance et la virtuosité de l'artiste.

Préserver la notion de virtuosité est un souci qui se traduit dans la recherche entreprise par Schloss pour améliorer le potentiel du Radio Drum. Son dernier projet de recherche, accompagné d’une éventuelle performance intitulée Can You Hear the Shape of a Drum?, s’inspire d'un article du mathématicien Marc Kac, paru en 1966, dans lequel celui-ci se demande si le tambour carré d’un shaman résonne différemment d'un tambour rond. (5) D’un point de vue technologique, Schloss espère rendre le Radio Drum plus réceptif et jouable pour que la programmation de l’instrument avec des algorithmes puisse se faire en temps réel devant public, mettant ainsi en valeur les habiletés du musicien et confirmant sa virtuosité.

Angela Plohman © 2001 FDL

(1) Schloss, Andrew, « Gesture-Sensing for Musical Performance: A Percussive Interface »,(référence du 6 juin 2001) : http://www.ece.uvic.ca/~peter/radiodrum.html

(2) Edwards, Michael, « The Seven Wonders of the Ancient World, A Concerto for Radio-Drum-Performed Piano and Ensemble, by David Jaffe (CD Review) », Array (printemps 1997), (référence du 6 juin 2001) : http://www.computermusic.org/members_only/array_issues/spring97/cd_reviews.html

(3) Jaffe, David A. et Schloss, Andrew, « Intelligent Musical Instruments: The Future of Musical Performance or the Demise of the Performer? » INTERFACE Journal for New Music Research, Vol. 22 No 3 (août 1993), n.p., (référence du 6 juin 2001) : http://www.finearts.uvic.ca/~aschloss/articles/interfacearticle.html

(4) « Cycling ’74 Community: Andrew Schloss Interview », Cycling '74 Community, (référence du 24 mai 2001) : http://www.cycling74.com/community/schloss.html

(5) Cette information provient du projet proposé par Schloss à la fondation Daniel Langlois, le 31 janvier 2001.