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Yvonne Spielmann

Entretien avec Bill Seaman

Bill Seaman, Gideon May, The World Generator, 1996-1997 (video)
Bill Seaman, Gideon May, The World Generator, 1996-1997 (video)
Bill Seaman, Dés chiffrés, 2000 Bill Seaman, Dés chiffrés, 2000 Bill Seaman, Dés chiffrés, 2000
[Reproduit grâce à l’aimable permission de Transcript, University of Manchester Press, édité par Kerstin Mey, 2002.]

Depuis la fin des années 1970 et du début des années 1980, Bill Seaman travaille la bande vidéo linéaire et il a poursuivi ses recherches à cet égard dans ses installations qui combinent vidéodisques et systèmes informatiques interactifs. Pareillement, il a réalisé à maintes reprises des versions différentes de la même œuvre, comme dans le cas de Exquisite Mechanism of Shivers (Le mécanisme exquis des frissons) (1991-1994) en version vidéo et cédérom. Même quand il pratique les médias interactifs dans l’installation Passage Sets/One Pulls Pivots at the Tip of the Tongue (1995) (Jeux de passages/On les fait tourner sur le bout de la langue), il réalise aussi une bande vidéo linéaire avec les mêmes matériaux audiovisuels. La projection de séquences vidéo sur grand écran semble elle aussi déterminante dans plusieurs de ses installations multimédias comme Exchange Fields (Champs d’échanges) (2000). Dans Exchange Fields, le spectateur-utilisateur, ou l’interactant comme l’appelle Seaman, interagit de manière plutôt physique avec un programme informatique qui dirige certaines séquences vidéo projetées à côté des images d’une bande vidéo linéaire en les plaçant en relation à des objets sculpturaux ou mobiliers. Cette œuvre laisse voir une chorégraphie de divers mouvements, où l’interactant doit se déplacer d’un meuble/sculpture à l’autre pour activer, par contact physique direct, différents passages d’un mouvement de danse. Ces mouvements sont exécutés à l’écran de manière telle que les séquences vidéo se superposent en transparence en fonction des multiples impulsions interactives transmises par un certain nombre d’interactants à la fois. De manière similaire à Exchange Fields dont la complexité élevée de mouvements provoque une densité spatiale, The World Generator/The Engine of Desire (Le générateur de mondes/La machine du désir) (1996-1998), une œuvre de réalité virtuelle réalisée antérieurement avec le programmeur Gideon May, demande à l’interactant d’« engendrer », par l’intermédiaire d’un système à menus donné, une relation réciproque entre des objets virtuels, des textes et de la musique, et de définir aussi leurs propriétés interactives et mobiles. L’interactant devient ainsi, d’une part, de plus en plus « l’auteur », voire le créateur, d’un monde virtuel multidimensionnel à travers lequel elle ou il navigue, pendant le déploiement spatial et temporel du matériel visuel sur grand écran. D’autre part, le traitement de l’image, du son et du texte dépend de certains principes structurants prédéfinis, dont certains sont plus fixes, comme la vidéo numérique, et d’autres plus ouverts, ou encore, sont des éléments assez librement reliés par hyperlien et proximité virtuelle. Dans cette rencontre avec la machine, au moins deux aspects de la créativité sont en jeu. C’est encore plus manifeste dans Red Dice/Dés chiffrés (2000), une œuvre récente de Seaman, qui englobe un poème (un texte écrit) et génère du texte sous forme de lectures non linéaires, circulaires et chevauchantes, et dont le sens est également amplifié et accumulé par des éléments visuels complémentaires, des textes connexes et de la musique. Plusieurs des images traitent de moteurs et d’objets physiques. Encore une fois, l’œuvre possède une ordonnance structurale ouverte et le processus interactif renforce à tout coup la passion de Seaman pour la recombinaison de textes et autres motifs sémiotiques et linguistiques. Si la bande vidéo de Dés chiffrés fait valoir la qualité méditative de ces mêmes matériaux, c’est un montage associatif, plus précisément une combinaison d’images au ralenti, une partition musicale, des paroles et des textes écrits en relation libre les uns avec les autres, qui guide l’interactant. Ces « passages » à travers des images, du son et de la musique, et des textes écrits et parlés, dont plusieurs de ses œuvres donnent la représentation, sont particulièrement révélateurs d’une stratégie qui consiste à travailler divers médias de telle façon qu’ils s’influencent les uns les autres par la combinaison, une sorte de combinaison par laquelle ils s’expriment diversement, et qui plonge également l’interactant dans des réseaux de motifs.

© 2003 FDL