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John Klima

(Brooklyn, New York, États-Unis)

John Klima, Glasbead, 1999
John Klima, Go, 2001 John Klima, Go Fish, 2001 John Klima, Ecosystm, 1999
John Klima vit et travaille à Brooklyn. Il est titulaire d’un baccalauréat en beaux-arts de la State University of New York à Purchase. Après un parcours professionnel dans des grandes firmes d’informatique, chez Microsoft entre autres, Klima profite des connaissances acquises en milieu de travail pour se consacrer à la création d’environnements interactifs complexes. Ses premières tentatives d’œuvres Web sont remarquées par le milieu de l’animation 3D et son travail est présenté dans des festivals prestigieux à l’échelle internationale dont le Viper: Internationale Festival für Film Video und neue Medien = International Festival for Film Video and New Media (Lucerne, Suisse) en 1999.

John Klima, The Great Game, 2001 John Klima, Earth, 2001 John Klima, Terrain Machine, 2002 John Klima, Context Breeder, 2002

Gagnante du Golden Lasso Award for Art remis lors du SIGGRAPH 2000 (Nouvelle Orléans, Louisiane), Glasbead (2000) (1) fait de Klima l’un des chefs de file de la génération émergente d’artistes Web. L’œuvre se présente comme un jeu interactif dont l’interface s’affiche sous la forme d’une sphère rotative chargée de fichiers sonores. En accédant à ces fichiers, les participants orchestrent des trames musicales qui se complexifient à mesure que leur présence s’additionne dans l’environnement en ligne.

Plusieurs projets de John Klima mettent en parallèle des interfaces de jeux vidéo et des éléments robotisés contrôlés en temps réel par le spectateur. Dans une exposition solo de l’artiste présentée à la galerie Postmasters (New York, New York, États-Unis) en 2001, deux œuvres conjuguent des espaces à la fois physiques et virtuels entre lesquels s’établit un rapport de causalité manifeste. Inspiré du jeu d’origine japonaise du même nom, GO (2000) est composé d’une aire de 16 par 24 pieds représentant une carte des devises internationales et d’une console de commande modulant simultanément l’environnement en 3D et les éléments robotiques de l’installation.

Munies de marqueurs spéciaux, les composantes robotiques de l’installation évoluent au sol en laissant des tracés expressifs proches des drippings de Jackson Pollock. Représentant un globe terrestre, l’interface de jeu en animation 3D est projetée sur un ballon météorologique. Les modules robotisés ne sont pas télécommandés mais fonctionnent par induction de courant électrique. Lorsque leur niveau d’énergie est à la baisse, ils se dirigent d’eux-mêmes vers les bornes de rechargement situées à des endroits stratégiques de l’aire de jeu que le joueur peut identifier à huit pays hôtes. La circonférence des disques lumineux dans l’environnement 3D fluctue selon les indices de la bourse. Lorsque l’indice est volatile, le disque prend de l’ampleur. La règle du jeu consiste à faire converger de petits satellites avec ces balises en utilisant une manette de commande, activant ou désactivant les bornes de rechargement au sol. Ainsi, tout en reflétant les fluctuations des indices boursiers, le tracé des modules robotisés est infléchit a posteriori par les interventions du spectateur. En bout de ligne, Go permet d’inscrire une part de libre arbitre dans des systèmes (cours de la bourse, économie) qui semblent opérer en vase clos.

Autre projet présenté dans l’exposition de Postmasters, Fish (2001) est un dispositif jouxtant un jeu vidéo d’arcade à une installation à composantes interactives. Le participant doit mener à bon port un poisson virtuel en le guidant dans un labyrinthe infesté de poissons prédateurs. Lorsque le joueur franchit avec succès les épreuves, un vrai poisson s’échappe d’un bac d’isolement pour rejoindre ses pairs libérés par d’autres participants dans un aquarium. En retour, quand le joueur faillit à la tâche, le poisson devient la proie d’un véritable prédateur. Bien que sans conséquences, ce sacrifice du poisson vivant manifeste une prise métaphorique du virtuel sur le réel.

Dans Ecosystm (2001) présenté lors de l’exposition BitStreams au Whitney Museum of American Art (New York, New York, États-Unis) (2) en 2001, John Klima cartographie des systèmes constitués d’ensembles de données structurées de façon aléatoire. Cette œuvre en animation 3D permet de visualiser simultanément le mouvement des devises monétaires, des indices boursiers et l’évolution des conditions météorologiques en provenance de l’aéroport John F. Kennedy. L’œuvre formule un commentaire allégorique sur les données qui lui servent de structure d’actualisation. Pour cristalliser les soubresauts de l’économie, Klima n’a pas choisi une imagerie abstraite mais un système analogue issu du monde naturel. L’animation 3D donne à voir des essaims d’oiseaux volant près d’une forêt. Chaque essaim pointe vers une devise nationale et est rattaché à une structure/arbre qui représente l’indice boursier le plus florissant de ce pays. Lorsque l’indice fluctue, les branches tombent et les oiseaux se dispersent de façon erratique. L’équilibre biologique des essaims d’oiseaux dépend donc de la stabilité économique du marché. Commandé pour les locaux de Zurich Capital Market, une firme de courtage new-yorkaise, cette œuvre recycle les données qu’emploie la compagnie pour mener à bien ses transactions quotidiennes.

Dans la foulée de Serbian Skylight (1999), première incursion de Klima dans l’univers des jeux de stratégies militaires, The Great Game (2001) emploie de nouveau une interface qui génère un modèle en trois dimensions à partir de données recueillies sur Internet. L’application Java fait défiler une animation 3D, qui représente la carte topographique de l’Afghanistan au début de l’escalade des conflits. Depuis le 7 octobre 2001, Klima lit attentivement les rapports de planification stratégique du ministère de la défense du gouvernement américain et il reporte ces données sur sa carte. Pour représenter les avions, les munitions et les effectifs militaires, il recycle l’iconographie propre aux pictogrammes des jeux vidéo à thématiques militaires. D’abord vierge, le territoire se couvre peu à peu d’icônes évoquant les stratégies militaires déployées par les occidentaux pour terrasser le régime des talibans. La genèse de l’œuvre et son mode d’exposition témoignent de la couverture partielle de cet événement. Comme la visualisation des faits d’actualité dépend de l’information disponible dans la sphère publique à un moment donné, l’image qui en résulte est toujours trompeuse. Contrairement aux jeux vidéo où il peut moduler le cours de l’action, le spectateur doit observer passivement la progression de cette main-mise sur le territoire.

EARTH (2001), une installation présentée à la biennale du Whitney Museum of American Art (New York, New York) en 2002, manifeste un rapport moins directement politique avec la notion de cartographie. Un logiciel positionne des données issues de laboratoires d’analyse géologiques, de satellites et de sites du gouvernement américain sur une représentation modélisée du globe terrestre. Ces données sont accessibles au spectateur sous forme de couches stratifiées. Par le truchement d’un curseur, ce dernier manipule l’interface et passe d’un niveau à l’autre sur la surface du globe. La première couche correspond au relief des zones côtières. S’y greffe une image satellite où le spectateur peut isoler une portion de territoire pour disposer d’informations sur les conditions météorologiques locales. Dans la version de l’œuvre présentée à la biennale du Whitney, un ballon météorologique fait office de support d’affichage des données. En utilisant un tel dispositif, Klima s’inscrit dans un nouveau courant de l’art en ligne, plus proche des pratiques de l’installation, où le cadre pré-formaté de la page Web ne constitue pas le seul contexte d’expérience de l’œuvre.

EARTH évalue de nouveau notre propension à utiliser une portion de l’information disponible pour fabriquer des points de vue qui semblent recouvrir l’ensemble d’un phénomène. Dans le sillage de EARTH, Klima élabore Terrain Machine, une installation qui recycle les données topographiques recueillies par le satellite Landsat-7 et d’autres outils de balisage pour matérialiser le relief terrestre sous la forme d’une portion modulable du territoire. Enfin, depuis 2002, Klima voit à la conception d’une nouvelle interface pour le moteur de recherche ArtBase de Rhizome. Sous le nom de Context Breeder, (3) cette interface établit une chaîne de liens signifiants entre les séquences d’objets que façonne chaque usager en formulant une requête. Poursuivant les recherches de Klima sur la modélisation de réseaux, Context Breeder permet de visualiser les caractéristiques subjectives propres aux utilisateurs d’une base de données en ligne.

Vincent Bonin © 2002 FDL